Le christianisme, une religion de liberté ? 

Martin Blais

 

Thomas d’Aquin fait sienne et développe cette idée étonnante, que le christianisme est une religion de liberté, quand il se demande si la loi nouvelle est plus onéreuse que la loi ancienne[1]. Mais, pour mieux comprendre sa réponse, il est bon de lire l’article où il divise la loi divine en loi ancienne – loi contenue dans l’Ancien Testament –, et loi nouvelle – celle de l’Évangile. Elles ne sont pas d’espèce différente, comme le bœuf et le cheval, dit-il ; elles diffèrent, dans la même espèce, comme l’imparfait diffère du parfait, l’enfant de l’adulte (Ia-IIae, q. 91, a. 5).

 

Le pédagogue fait marcher l’enfant en utilisant les punitions et les récompenses. Les  punitions surtout, car « il est plus difficile de supporter la douleur que de s’abstenir du plaisir[2] ». La loi ancienne retient la main, cohibet manum ; la loi nouvelle retient l’esprit, cohibet animum. Saint Augustin tranche, en deux mots, la question de la différence entre la loi ancienne et la loi de l’Évangile : crainte et amour – timor et amor (Ibid.). Un théologien plein d’esprit a décrit le Dieu de l’Ancien Testament comme étant le « Dieu des armées » ; celui du Nouveau Testament, le « Dieu désarmé ».

 

I. La loi de crainte de l’Ancien Testament

 

Le Dieu de l’Ancien Testament est souvent appelé Dieu des armées – Dieu Sabaot (Psaume 80 (79), quatre fois ; Yahvé Sabaot (Psaume 84 (83), quatre fois. Jérémie se sent en sécurité, car le Seigneur est avec lui comme un « guerrier redoutable » (20, 11).  On lit dans le psaume 3, 8 : « Lève-toi, Yahvé ! Sauve-moi, mon Dieu ! Tu frappes à la joue tous mes adversaires, les dents des impies, tu les brises. » On est loin de l’Évangile, où il est dit : « Si on te frappe sur la joue droite, présente la gauche. » Allons au psaume 7, 7 : « Lève-toi, Yahvé, dans ta colère, dresse-toi contre les excès de mes oppresseurs. »

 

1. Prescriptions qui donnent la chair de poule

 

 Timor, a dit saint Augustin. On a le choix des exemples, car ils abondent. En voici quelques-uns. « Alors que les Israélites étaient dans le désert, on surprit un homme qui ramassait du bois le jour du sabbat. Ceux qui l’avaient surpris l’amenèrent à Moïse, à Aaron et à toute la communauté. […] Yahvé dit à Moïse : " Cet homme doit être mis à mort. Que toute la communauté le lapide hors du camp. " Elle le fit sortir hors du camp et le lapida jusqu’à ce que mort s’ensuivit » (Nombres 15, 32-36).

 

En lisant : « Yahvé dit à Moïse », il ne faut pas se méprendre ; Yahvé n’a rien dit à Moïse. Serviteur de Dieu, Moïse était censé transmettre aux Israélites la volonté de Dieu, qu’il n’était jamais sûr de connaître : « Vos pensées ne sont pas mes pensées, et mes voies ne sont pas vos voies » (Isaïe 55, 8). Naguère, au Québec et ailleurs, on disait avec saint Paul que « tout pouvoir vient de Dieu », que le chef remplace Dieu, que sa volonté est la volonté de Dieu. C’est de cette manière que Yahvé parlait à Moïse. La  couverture du livre de Jean-Paul II, Entrez dans l’espérance, mentionne : « Au seuil du troisième millénaire, par la voie chaleureuse de Jean-Paul II, c’est Dieu lui-même qui inlassablement nous déclare son amour. » Il est osé d’affirmer : « C’est Dieu lui-même », car ce n’est pas Dieu mais le remplaçant du Christ à la tête de l’Église, son vicaire, et le vicaire ne doit jamais être pris ni se prendre pour le curé.

 

D’autres exemples. Un jour, Yahvé dit à Moïse : « Après-demain, Yahvé descendra aux yeux de tout le peuple sur la montagne du Sinaï. Gardez-vous de gravir la montagne et même d’en approcher le bord. Quiconque touchera la montagne, homme ou bête, sera lapidé ou percé de flèches » (Exode 19, 11-13). Un peu plus loin dans l’Exode, on trouve d’autres cas où un bœuf sera lapidé : s’il encorne une personne et cause sa mort, il sera lapidé ; si un  bœuf donnait déjà de la corne, et que le propriétaire, averti de ce fait, ne l’a pas surveillé, si ce bœuf cause la mort d’un homme ou d’une femme, il sera lapidé et son propriétaire sera mis à mort (Exode 21, 28-32). Lapider un bœuf, admettez que c’est vache.

 

Après l’épisode du veau d’or, Yahvé, furieux, dit à Moïse : « J’ai vu ce peuple : c’est un peuple à la nuque raide. Laisse-moi ; ma colère va s’enflammer contre eux, et je les exterminerai. » Moïse argumente : « Pourquoi, Yahvé, ta colère s’enflammerait-elle contre ton peuple que tu as fait sortir d’Égypte par ta grande force et ta main puissante ? » Les Égyptiens vont se moquer. Yahvé trouve les arguments de Moïse pleins de bon sens et il se calme (Exode 32, 1-14).

 

En route dans le désert, le peuple perdit patience et maugréa contre Dieu et contre Moïse : « Pourquoi nous avez-vous fait monter d’Égypte pour mourir en ce désert ? Car il n’y a ni pain ni eau ; nous sommes excédés de cette nourriture de famine. » Dieu envoya alors contre le peuple des serpents brûlants dont la morsure fit périr beaucoup de monde en Israël. Se situe ici l’épisode du serpent d’airain placé sur un étendard. Ceux qui avaient été mordus par les « serpents brûlants » étaient guéris en regardant le serpent d’airain sur l’étendard (Nombres 21, 4-9).

 

« Les fils d’Aaron, Nadab et Abihu, prirent chacun son encensoir. Ils y mirent du feu sur lequel ils posèrent de l’encens, et ils présentèrent devant Yahvé un feu irrégulier, qu’il ne leur avait pas prescrit. De devant Yahvé jaillit alors une flamme qui les dévora » (Lévitique 10, 1-2). En quoi ce feu était-il irrégulier ? En note, la Bible de Jérusalem tente une explication : « Peut-être que les deux hommes n’étaient pas prêtres ou que le feu avait été présenté hors du temps prescrit. » Quoi qu’il en soit, on reste avec l’impression que Yahvé était à prendre avec des pincettes.

 

On n’en finirait plus d’énumérer les cas où la peine de mort était imposée. « Quiconque s’accouple avec une bête sera mis à mort » (Exode 22, 18). « L’homme qui commet l’adultère avec la femme de son prochain devra mourir, lui et sa complice » (Lévitique 20, 10). « L’homme qui couche avec la femme de son père, ou avec sa belle-fille, ou avec un homme comme on couche avec une femme, ou l’homme qui prend pour épouses une femme et sa mère, on les brûlera, lui et elles, ou l’homme qui couche avec une bête, ou la femme qui s’approche d’un animal quelconque pour s’accoupler à lui », tout ce beau monde devra mourir (Lévitique 20, 10-17).

 

« Moi, Yahvé, ton Dieu, je suis un Dieu jaloux, qui punis la faute des pères sur les enfants, les petits-enfants et les arrière-petits-enfants pour ceux qui me haïssent, mais qui fais grâce à des milliers pour ceux qui m’aiment et gardent mes commandements » (Exode 20, 5-6). Punir jusqu’aux petits-enfants et aux arrière-petits-enfants, c’est punir « jusqu’à la troisième et la quatrième génération » (Exode 34, 7). Il se qualifie quand même de « Dieu de tendresse et de pitié, lent à la colère » (Exode 34, 6) et il prescrit : « Tu ne te vengeras pas et tu ne garderas pas de rancune envers les enfants de ton peuple » (Lévitique 19, 18). Pas facile à comprendre. On voit bien que la Bible a été rédigée par plusieurs auteurs et à différentes époques.

 

Après que le peuple se fut livré à la prostitution avec les filles de Moab, la colère de Yahvé s’enflamma et il ordonna à Moïse : « Prends tous les chefs du peuple et empale-les à la face du soleil » (Nombres 25, 1-4). Quel spectacle ! Empaler, c’est faire subir le supplice du pal, longue pièce de bois ou de métal, aiguisée par un bout, et qu’on enfonçait dans le fondement du condamné, sans l’avoir enduit de vaseline, la plupart du temps ! Bien au contraire : si le pal était de métal, on pouvait le rougir au feu ; s’il était constitué d’une branche, on pouvait laisser des petits nœuds. En langage familier, le fondement, c’est l’anus.

 

Avant une bataille, Yahvé rassura Josué : « N’aie pas peur car, demain, à la même heure, je les donnerai tous [tes ennemis], transpercés, à Israël. Tu couperas les jarrets de leurs chevaux et tu incendieras leurs chars » (Josué 11, 6). On ne peut pas imaginer que Yahvé ait vraiment dit à Josué, le successeur de Moïse à la tête du peuple hébreu, de couper les jarrets des chevaux. Josué en rend Yahvé responsable, mais cet ordre émanait de lui, Josué, conformément aux mœurs barbares de l’époque. 

 

Le moins que l’on puisse dire, c’est que la vie humaine ne valait pas cher sous l’Ancien Testament. C’était, sans conteste, le règne de la terreur. Pourtant, on lit dans Isaïe : « Cieux, criez de joie, terre exulte, que les montagnes poussent des cris, car Yahvé a consolé son peuple, il prend en pitié ses affligés. Sion avait dit : " Yahvé m’a abandonnée, le Seigneur m’a oubliée ". Une femme oublie-t-elle son petit enfant, est-elle sans pitié pour le fils de ses entrailles ? Même si les femmes oubliaient, moi, je ne t’oublierai pas » (Isaïe 49, 13-15). On trouve des propos semblables dans Isaïe 43 : « Ne crains pas, car je t’ai racheté, je t’ai appelé par ton nom : tu es à moi. Tu comptes beaucoup à mes yeux, tu as du prix et je t’aime. »

 

2. Prescriptions plutôt amusantes pour les infidèles 

 

         Les prescriptions de la loi ancienne ne donnent pas toutes la chair de poule : plusieurs sont amusantes pour les infidèles que nous sommes. Je pense d’abord à la circoncision. Pour participer aux cérémonies légales, un Juif devait être circoncis. Partant, la circoncision jouait, dans l’Ancien Testament, le rôle du baptême dans le Nouveau. Tous les adultes mâles sortis d’Égypte étaient morts dans le désert, mais on n’avait pas circoncis les enfants mâles nés dans le désert. Avant l’entrée dans la terre promise, Yahvé dit à Josué : « Fais-toi des couteaux de silex et circoncis tous ces hommes sur le Tertre des Prépuces. Ils restèrent sur place jusqu’à la guérison » (Josué 5, 1-9). La traduction Bayard parle de la colline des prépuces. Ce tertre, ou cette colline, ou ce monticule était formé des dizaines de milliers de prépuces tranchés sur ordre de Yahvé. À froid, s’il vous plaît. Instinctivement, on serre les cuisses. J’ai dit des dizaines de milliers, mais c’est peut-être davantage. En effet, quand les Juifs voulurent manger de la viande dans le désert, Yahvé leur en a promis : « Vous n’en mangerez pas un jour seulement, ou deux, ou cinq, ou dix, ou vingt, mais tout un mois, jusqu’à ce qu’elle vous sorte pas les narines. » Moïse trouve que Yahvé exagère ; où trouvera-t-il tant de viande ? « Le peuple où je suis compte 600 000 hommes de pied » (Nombres 11, 18-21).

 

L’expression bouc émissaire nous est familière. Son origine remonte à l’Ancien Testament. Lors d’une cérémonie, le grand prêtre prenait un bouc, lui mettait les deux mains sur la tête, confessait les iniquités des enfants d’Israël, en chargeait le pauvre animal, qu’on chassait ensuite dans le désert où il était dévoré par les bêtes sauvages (Lévitique 16, 7, 11, 18-26). On disait que le bouc emportait les péchés du peuple. C’était encore plus commode que l’absolution collective.

 

Les empêchements au sacerdoce nous étonnent par leur nombre et leur précision. Yahvé confie un message à Moïse pour Aaron : « Nul de tes descendants, à quelque génération que ce soit, ne s’approchera pour offrir l’aliment de son Dieu s’il a une infirmité […], que ce soit un aveugle ou un boiteux, un homme défiguré ou déformé, un homme dont le pied ou le bras soit fracturé, un bossu, un rachitique, un homme atteint d’ophtalmie, de dartre ou de plaies purulentes, ou un eunuque » (Lévitique 21, 16-20). Yahvé est difficile : il ne veut pas de prêtres infirmes ni de victimes aux testicules rentrés, écrasés, arrachés ou coupés (Ibid., 21, 24).

 

L’Exode contient une autre prescription qui nous fait sourire : « Tu ne monteras pas à mon autel par des marches pour n’y pas laisser voir ta nudité » (Op. cit., 20, 26). Thomas d’Aquin commente cette prescription (Ia-IIae, q. 102, a. 4, sol. 7). À l’époque où fut élevé le premier autel, après la promulgation du décalogue, les prêtres portaient des tuniques courtes. Si les prêtres avaient gravi plusieurs marches pour arriver à l’autel, le peuple aurait pu voir leur « nudité », dit pudiquement la Bible, c’est-à-dire leurs organes sexuels, et il aurait été facilement distrait, surtout les femmes et les homosexuels. C’est pourquoi L’Exode ordonne de confectionner pour les lévites « des caleçons de lin pour couvrir leur nudité depuis les reins jusqu’aux cuisses » (28, 42).

 

Les vaches rousses étaient regardées avec compassion par leurs consœurs d’autre couleur, car on offrait des rousses en sacrifice pour les péchés (Nombres, 19). Pourquoi des vaches ? et pourquoi des rousses ? Thomas d’Aquin pense que le Seigneur demandait aux prêtres de prendre des « vaches » en mémoire du péché commis par les Hébreux lors de l’adoration du veau d’or. Mais alors, pourquoi pas un veau ? Non, car il est dit dans Osée : « Israël s’est détourné du Seigneur comme une vache emportée » [Œil pour œil, dent pour dent, vache pour vache.] (4, 16). Peut-être aussi parce que les Hébreux adorèrent la vache, à l’exemple des Égyptiens. Osée rapporte : « Ils adorèrent les vaches de Béthaven » – ne pas confondre avec Beethoven (10, 5) (Ia-IIae, q. 105, a. 5, sol. 8). Pourquoi des vaches « rousses » ? Parce que, dans l’ancien Orient, tout ce qui s’approchait du rouge avait valeur prophylactique : un remède prophylactique prévient la maladie ; le sacrifice d’une vache rousse devait expier le péché et le prévenir. Chaque fois qu’on voulait effacer le crime d’idolâtrie, on immolait une vache rousse.

 

Yahvé dit à Moïse : « Prends les Lévites du milieu des Israélites et purifie-les. Ainsi feras-tu pour les purifier : tu feras sur eux une aspersion d’eau lustrale, ils se raseront tous les poils du corps et laveront leurs vêtements, alors ils seront purs » (Nombres 8, 5-7). [La confession n’était pas encore inventée.] Comme toujours, Thomas d’Aquin commente longuement (Ia-IIae, q. 102, a. 5, sol. 8). Il pense que les poils symbolisaient les mauvaises pensées ; se les raser, c’était les éloigner.

 

« Lorsque vous serez entrés en ce pays [la terre promise] et que vous aurez planté quelque arbre fruitier, vous considérerez ses fruits comme si c’était son prépuce. Pendant trois ans ils seront pour vous une chose incirconcise, on n’en mangera pas » (Lévitique 19, 23). Voici une intéressante prescription pour les octogénaires : « Tu te lèveras devant une tête chenue, tu honoreras la personne du vieillard » (Lévitique 19, 32). « Vous n’arrondirez pas le bord de votre chevelure ; tu ne couperas pas le bord de ta barbe » (Lévitique 19, 27). J’ai trois bibles : Jérusalem, Maredsous et Bayard ; chacune donne une traduction différente de cette dernière prescription. L’Évangile nous a appris que les cheveux de nos têtes sont comptés, sans doute aussi les poils de nos visages, mais il ne nous dit pas comment les couper.

 

Cela suffit, je pense, pour montrer que l’Ancien Testament était le règne de la terreur. Et saint Augustin a certes raison d’affirmer qu’il est « impossible de tenir tête à ceux qui détestent et raillent la Loi et les Prophètes », car « maints passages [sont] des textes de mort[3] ». Allah est un tendre, en autant que le Coran nous le révèle, quand on le compare à Jahvé.

 

II. La loi d’amour de l’Évangile

 

Pour montrer qu’avec la loi de l’Évangile on passe de la crainte à l’amour – on n’y est pas passé du jour au lendemain –, Thomas d’Aquin commence par rappeler ces paroles de Jésus : « Venez à moi vous tous qui peinez et ployez sous le fardeau, et je vous soulagerai. Chargez-vous de mon joug et mettez-vous à mon école, car je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez soulagement pour vos âmes. Oui, mon joug est aisé et mon fardeau léger » (Matthieu 11, 28-29). L’éducation religieuse que j’ai reçue dans ma jeunesse se situait dans le prolongement de l’Ancien Testament. On parlait peu d’amour, mais beaucoup de justice divine, de péché mortel, d’enfer et du petit nombre des élus. Le jour du décès n’était pas le retour de l’enfant prodigue à la maison du Père, mais un jour de colère : Dies irae, chantait-on aux funérailles. L’enfant prodigue ne s’attendait pas qu’on tue le veau gras pour souligner son retour, mais bien plutôt qu’on le tue à la place du veau.

 

         1. Le fardeau de la loi nouvelle est léger

 

Les actes vertueux qui nous sont prescrits présentent deux difficultés : la première est attachée à l’opération extérieure elle-même ; la deuxième, à l’opération intérieure. Examinons la première difficulté, celle que constituent les opérations extérieures. De ce point de vue, affirme Thomas d’Aquin, la loi de l’Ancien Testament était beaucoup plus exigeante que la loi nouvelle. Elle obligeait à de multiples cérémonies. La Bible vient de nous en apprendre de nombreuses, quelques-unes ont fait sourire les cyniques. Les Juifs d’alors auraient eu davantage raison que le savetier de La Fontaine de se plaindre : « On nous ruine en fêtes », maugréait ce dernier (Sur le grand nombre de fêtes, voir Le Lévitique 23, 24, 25 ; Les Nombres 28, 29).

 

1.1. La loi nouvelle et les préceptes moraux

 

         Thomas d’Aquin va maintenant se référer à la triple distinction des préceptes de l’Ancien Testament : préceptes moraux, préceptes cérémoniels et préceptes judiciaires (Ia-IIae, q. 99, a. 5). Il va examiner chacune de ces catégories de préceptes pour montrer que la loi nouvelle est, du point de vue des actes extérieurs à poser, moins exigeante que l’ancienne.

 

         La loi nouvelle, qui nous vient du Christ et des Apôtres, ajoute très peu de préceptes, paucissima praecepta, à la loi naturelle (Ia-IIae, q. 107, a. 4). Mais, comme on se méprend beaucoup sur la notion de loi naturelle, il faut en toucher un mot. Pour la comprendre, oublions les jolies métaphores qui nous la présentent comme étant « gravée par Dieu dans le cœur de l’homme » ou encore « écrite et gravée dans l’âme », comme dit Léon XIII, cité par le Catéchisme de l’Église catholique (§ 1954). Identifier Dieu comme graveur de la loi naturelle crée l’impression d’une loi imposée de l’extérieur. Thomas d’Aquin va provoquer un choc en affirmant que la loi naturelle est constituée par la raison : Lex naturalis est aliquid per rationem constitutum (Ia-IIae, q. 94, a. 1).

 

         La loi naturelle est élaborée à partir des inclinations naturelles que l’être humain découvre en lui et que, sauf en de rares moments de sa vie, il trouve bonnes : inclination à manger, à boire, à dormir, à se reposer, à l’union des sexes, à la vie en société, à s’instruire, à se faire des amis, etc. Les inclinations naturelles ne sont pas la loi naturelle ; cette dernière est constituée par les règles de conduite que l’être humain se donne pour que ses inclinations naturelles tournent à son bien-être et non à son détriment. Les vertus morales, acquises par la répétition des actes appropriés à chacune, interviennent pour rendre facile et agréable ce qui, au début, pouvait être pénible.

 

         Paul Valéry fait une bien mauvaise réputation à la morale quand il écrit : « La morale est une sorte d’art de l’inexécution des désirs, […] de faire ce qui ne plaît pas, de ne pas faire ce qui plaît. Si le bien plaisait, si le mal déplaisait : il n’y aurait ni morale, ni bien, ni mal[4]» Non ; les seuls désirs que la morale authentique interdit d’exécuter, ce sont les désirs déréglés, car la raison est la règle de moralité. Quant au bien, c’est-à-dire ce qui convient : Quod est conveniens alicui, est ei bonum[5], il peut déplaire aux sens, mais plaire à la volonté. C’est ainsi qu’on aime la chaise du dentiste ou la chimiothérapie. Il en est ainsi du mal : il peut attirer les sens, mais être repoussé par la volonté. La vertu, disposition stable acquise par des actes répétés, facilite les choses. Par elle, dit Thomas d’Aquin, l’action devient uniforme, prompte et agréable[6]. Sénèque fait de l’uniformité dans l’action un fruit de la vertu : « Allons, que la vertu prenne les devants, notre démarche sera partout plus sûre, tutum erit vestigium[7]. »  

 

         Les quelques préceptes, paucissima praecepta, que la loi nouvelle ajoute à la loi naturelle sont ceux qui ne découlent pas d’une inclination naturelle. Le discours sur la montagne en contient quelques-uns : Aimez vos ennemis ; priez pour vos persécuteurs ; à qui vous frappe sur la joue droite, présentez la gauche (Matthieu 5, 38-45). Personne ne ressent une inclination naturelle à aimer ses ennemis, voire à pardonner (Matthieu 6, 14). 

 

         Quand il étudie les préceptes moraux de la loi ancienne (Ia-IIae, q. 100, a 1), Thomas d’Aquin  prouve d’abord qu’ils appartiennent à la loi naturelle, puis que ces préceptes moraux commandent les actes de toutes les vertus (Ibid., a. 2), que tout le monde doit pratiquer : justice, force ou courage, tempérance ou modération. Il ajoute que tous les préceptes moraux de la loi ancienne se résument dans les dix commandements du décalogue (Ibid., a. 3).

 

         Comme la grâce ne supprime pas la nature, mais la perfectionne (Ia, q. 1, a. 8), le chrétien doit pratiquer les vertus morales comme elles se pratiquaient sous l’Ancien Testament et comme les ont enseignées les grands philosophes. Thomas d’Aquin n’a pas eu besoin de faire violence à l’éthique d’Aristote pour l’incorporer à la sienne. Aux Romains, saint Paul écrit : « Les Gentils, qui n’ont pas la loi [de l’Ancien Testament ou du Nouveau] font naturellement ce qui est selon la loi » (2, 14).

 

         Toute la morale est donc enracinée dans la nature humaine. Elle n’exige rien qui soit contre nature, sinon par héroïsme, chez ceux qui se font eunuques pour le Royaume des cieux : ce n’est pas la nature qui incline vers la pratique des conseils évangéliques. Pour montrer que la morale est enracinée dans la nature humaine et dans la nature humaine telle qu’elle se réalise dans chaque individu, Thomas d’Aquin énonce, dans la Somme contre les Gentils, cette affirmation étonnante : Non enim Deus a nobis offenditur nisi ex eo quod contra nostrum bonum agimus (c. 122). Si l’on colle aux mots, cela donne : « En effet,  Dieu n’est pas offensé par nous si ce n’est du fait que nous agissons contre notre bien. » Plus simplement : « Nous offensons Dieu quand nous agissons contre notre bien. » Et c’est nous qui décidons de notre bien, c’est-à-dire de ce qui nous convient. « Le premier de tous [les préceptes] et le seul au fond : obéis à ta conscience[8]. » Écoutons de nouveau Sénèque : « C’est la nature qu’on doit prendre comme guide ; c’est elle que la raison observe, elle qu’elle consulte. Donc cela revient au même de vivre heureux ou selon la nature[9]. »

 

En ce qui concerne les aliments et les boissons, le Christ a drôlement simplifié les choses par son enseignement et par son exemple. D’abord, par son enseignement. « Rien de ce qui pénètre du dehors dans l’homme ne peut le souiller, parce que cela ne pénètre pas dans le cœur, mais dans le ventre, puis s’en va aux lieux d’aisance. » Ainsi il déclarait purs tous les aliments. Puis, par son exemple. « Jean vient : il ne mange ni ne boit, et l’on dit : " Il est possédé du démon. " Le Fils de l’homme vient : il mange et boit, et l’on dit : " Voilà un glouton, un buveur de vin. " » (Matthieu 11, 17-19). Le Christ ne pouvait pas renier L’Ecclésiastique : « Le vin, c’est la vie pour l’homme, quand on le boit modérément. Quelle vie mène-t-on privé de vin ? Il a été créé pour la joie des hommes » (31, 27). Comme il devait utiliser le vin et non l’eau pour l’eucharistie, il était normal qu’il ne l’exclue pas de son alimentation. Un repas eucharistique au pain et à l’eau aurait semblé, à d’aucuns, une pitance de prisonniers. Saint Paul relaie l’enseignement du Christ au sujet des aliments et des boissons quand il écrit aux Colossiens : « Que nul ne vous condamne sur ce que vous mangez ou buvez » (2, 16).

 

On rencontre des restrictions alimentaires chez les juifs et chez les musulmans, mais celles des juifs, beaucoup plus nombreuses, sont mieux connues en Occident parce que la Bible y compte plus de lecteurs que le Coran. Le Lévitique (11, 3-23) donne des précisions à ce sujet sur les animaux terrestres, les animaux aquatiques, les oiseaux et les bestioles ailées. Parmi les animaux terrestres, le juif peut manger « tout animal qui a le sabot fourchu, fendu en deux ongles, et qui rumine ». Pour éviter toute erreur, il attire l’attention sur le chameau, le lièvre et le porc. Le chameau et le lièvre ruminent, mais ils n’ont pas le sabot fourchu. (Le lièvre devait donc à une erreur de classification de ne pas être servi en civet sur les tables juives.) Quant au porc, il a bien le sabot fourchu, mais il ne rumine pas. « Parmi ce qui vit dans l’eau, vous pourrez manger tout ce qui a nageoires et écailles » (11, 9). Le Lévitique dresse une longue liste des oiseaux « immondes » à ne pas manger. Je vous en fais grâce, ne retenant que la chauve-souris (11, 13-19), qui pour nous est un mammifère volant et non un oiseau. Enfin, « toutes les bestioles ailées qui marchent sur quatre pattes, vous les tiendrez pour immondes, Vous ne pourrez manger que celles qui ont des pattes au-dessus de leurs pieds, pour sauter sur le sol. » Certaines espèces de sauterelles étaient permises (11, 20-23). Jean-Baptiste observait donc la loi puisqu’il se nourrissait de sauterelles et de miel sauvage (Matthieu 3, 4). La Bible contient d’autres prescriptions, mais je pense que cela suffit pour donner une idée des contraintes auxquelles les juifs étaient soumis dans leur alimentation. Ceux qui en désirent la totalité peuvent consulter Internet : Google : Judaïsme, Alimentation.

 

Les restrictions alimentaires des musulmans sont moins nombreuses. D’abord, le vin, que le Coran associe au jeu ; l’un et l’autre sont un mal (Sourate II, 216).  « Ô croyants, le vin, les jeux de hasard […] sont une abomination inventée par Satan ; abstenez-vous-en, et vous serez heureux » (Sourate V, 92). « Satan désire exciter la haine et l’inimité entre vous par le vin et le jeu » (Sourate V, 93). On s’étonne cependant : « Parmi les fruits, vous avez le palmier et la vigne, d’où vous retirez une boisson enivrante et une nourriture agréable » (Sourate XVI, 69). Mais il met en garde : « Ô croyants, ne priez pas lorsque vous êtes ivres » (Sourate IV, 46).

 

Voici quelques aliments interdits par le Coran : « Les animaux morts, le sang, la chair du porc, tout ce qui a été tué sous l’invocation d’un autre nom que celui de Dieu, les animaux suffoqués, assommés, tués par quelque chute ou d’un coup de corne ; ceux qui ont été entamés par une bête féroce, à moins que vous les ayez purifiés par une saignée ; ce qui a été immolé aux autels des idoles ; tout cela est défendu » (Sourate V, 4).

 

Deux des sept commandements de l’Église, au temps de mon petit Catéchisme,  concernaient l’alimentation ; le cinquième et le sixième. Il formulait ainsi le cinquième : « Quatre-temps, vigiles jeûneras, et le carême entièrement. » Et ainsi le sixième : «  Vendredi chair ne mangeras, ni jours défendus mêmement. » Dans le Catéchisme de l’Église catholique (§ 2043), le cinquième est devenu : « Le jeûne prescrit garderas et l’abstinence également. » Le sixième : « Vendredi chair ne mangeras ni jours défendus mêmement » est supprimé. Le septième : « Droits et dîmes tu paieras à l’Église fidèlement » est devenu : « Les fidèles ont encore l’obligation de subvenir, chacun selon ses moyens, aux nécessités matérielles de l’Église. »

 

Dès le XIIe siècle, Abélard contestait le sixième : « Vendredi chair ne mangeras ni jours défendus mêmement. » Il le faisait avec une admirable  lucidité : « Actuellement, si nous nous abstenons de viande, est-ce un si grand mérite, quand nos tables sont chargées d’une quantité superflue d’autres aliments ? Nous achetons à grands frais toutes sortes de poissons ; nous mélangeons les saveurs du poivre et des épices ; gorgés de vin, nous y ajoutons encore des boissons et des liqueurs fortes. L’excuse de tout cela, c’est l’abstinence de viandes à vil prix[10]. » 

 

Huit siècles plus tard, le chanoine Jacques Leclercq renouvelait l’argument d’Abélard : « Autrefois, on ne s’occupait que des riches, et on a l’impression que l’Église même ne pensait qu’à eux. […] Imposer à titre de pénitence de manger une fois par semaine du poisson, à des gens qui ne mangent jamais de viande, ou n’en mangent pas une fois par semaine, qui, de plus, sont trop pauvres pour acheter du poisson – car le poisson est le plus souvent un aliment cher – n’est-ce pas une dérision ? […] Un incroyant comprendra-t-il jamais qu’il y ait péché mortel à manger une bouchée de viande un vendredi, et qu’il n’y ait pas la plus petite faute morale à faire le banquet le plus raffiné, pourvu qu’il soit conforme à la règle ? Caviar, huîtres, langoustes, etc.[11]. »

 

En bref, tous les préceptes moraux de la loi ancienne appartiennent à la loi naturelle (Ia-IIae, q. 100, a. 1) ; ils obligent à la pratique de toutes les vertus (Ia-IIae, q. 100, a. 2) et ils se ramènent aux dix commandements du décalogue (Ia-IIae, q. 100, a. 3). La loi nouvelle y ajoute bien peu de préceptes, paucissima praecepta.

 

1.2. La loi nouvelle et les préceptes cérémoniels

 

L’homme se met en rapport avec Dieu non seulement par les actes de l’esprit (croire, espérer et aimer), mais aussi par des actes extérieurs qui portent le nom de cérémonies, d’où l’expression préceptes cérémoniels.

 

Selon une habitude bien ancrée, Thomas d’Aquin s’intéresse à l’origine du mot cérémonie. Il rapporte deux témoignages à ce sujet. Selon certains auteurs, le mot aurait été formé du nom de la déesse des moissons, Cérès, et de munia, « dons », parce que les fruits de la terre furent les premières offrandes des humains à Dieu. Maxime Valère émet une autre hypothèse : le mot cérémonie viendrait non pas de Cérès mais de Céré, bourgade située non loin de Rome, dont les habitants avaient reçu avec respect les divinités romaines, qui y furent transportées lors de l’invasion des Gaulois. Quoi qu’il en soit de ces étymologies, Thomas d’Aquin conclut que les préceptes concernant le culte extérieur rendu à Dieu sont à juste titre qualifiés de cérémoniels (Ia-IIae, q. 99, a. 3).

 

Les préceptes cérémoniels de la loi ancienne n’avaient plus leur raison d’être sous la loi nouvelle, car ce qu’ils figuraient était accompli ; la loi nouvelle n’a donc rien prescrit à ce sujet (Ia-IIae, q. 108, a. 3, sol. 3). Cependant, les sacrements de la loi nouvelle devaient être institués par le Christ lui-même, source de la grâce, que les sacrements nous procurent.  Les autres cérémonies ont été laissées au libre arbitre humain, relinquuntur humano arbitrio (Ia-IIae, q. 108, a. 2, c).

 

En réponse à la deuxième objection, Thomas d’Aquin emploie une formule différente en parlant des cérémonies autres que les sacrements :  Dominus fidelibus instituenda reliquit pro suo arbitrio (Ia-IIae, q. 108, a. 2, sol. 2). Le Seigneur a laissé au libre arbitre des fidèles le soin de légiférer en ce domaine. Les traducteurs de la Somme théologique de Lachat ont observé l’aphorisme italien, Traduttore, traditore, en rendant l’expression reliquit fidelibus de Thomas d’Aquin par « laissé à l’Église[12] ». En note, ils ont tenté de justifier leur refus de rendre fidelibus par « aux fidèles » : Non fidelibus quibuscumque – non pas à n’importe quels fidèles – sed iis ad quos cura ministerii ecclesiastici pertinetmais à ceux qui sont responsables du ministère ecclésiastique – ut planum est – comme il est évident. Ce n’est peut-être pas si évident. Surtout depuis que l’on ne cesse de dire aux fidèles : « Vous êtes l’Église. »

 

Au sujet des préceptes cérémoniels, voici l’opinion d’Augustin, rapportée par Thomas d’Aquin (Ia-IIae, q. 107, a. 4) : « Dieu, dans sa miséricorde, a voulu que la nouvelle religion qu’il nous a donnée fût une religion de liberté, puisqu’il l’a réduite à un très petit nombre de pratiques extérieures de la plus grande simplicité. Or, voici que certains individus la surchargent d’une foule de pratiques serviles, au point que la condition des Juifs, avec toutes leurs observances légales, serait encore plus supportable que celle qu’ils veulent nous faire, puisque les Juifs, au moins, ne dépendaient pas des caprices humains » (Augustin, Lettres, LV, c. 19, tome 4, p. 480-481).

 

Aux dix commandements de Dieu, le petit Catéchisme de mon enfance ajoutait sept commandements de l’Église, dont le Catéchisme de l’Église catholique (CECC, 1993) ne fait pas mention verbatim. Il les a remaniés. Les quatre premiers sont des préceptes cérémoniels, c’est-à-dire des préceptes qui font partie du culte extérieur à rendre à Dieu. Je rappelle les sept à l’intention de ceux qui les ont oubliés et de ceux qui ne les apprennent plus : 

 

                   Les fêtes tu sanctifieras,

                   Qui te sont de commandement

 

                   Les dimanches messe entendras

                   Et les fêtes pareillement.

 

                   Tous tes péchés confesseras,

                   À tout le moins une fois l’an.

 

                   Ton Créateur tu recevras,

                   Au moins à Pâques humblement.

 

                   Quatre-temps, vigiles jeûneras,

                   Et le carême entièrement.

 

                   Vendredi chair ne mangeras,

                   Ni jours défendus mêmement.

 

                   Droits et dîmes tu paieras,

                   À l’Église fidèlement.

 

Le péché mortel servait de toile de fond à la plupart de ces commandements. En parlant des préceptes moraux, j’ai rapporté les commentaires d’Abélard et de Jacques Leclercq sur les cinquième et sixième commandements. Un commentaire s’impose au sujet du troisième : « Tous tes péchés confesseras, à tout le moins une fois l’an. »

 

         Lors de l’interdiction de l’absolution collective, qui se répandait au grand plaisir des fidèles, le cardinal Marc Ouellet, alors à Québec, a écrit une « lettre pastorale » dans laquelle il parlait de la nécessité de la confession avec absolution individuelle dans le cas de « péché grave » – le péché « grave », c’est notre bon vieux péché mortel : en près d’un demi-siècle de fréquentation de l’église, à Notre-Dame-de-Foy, je n’en ai jamais entendu parler, ni de son corollaire obligé, l’enfer éternel . Le troisième commandement de l’Église a-t-il été abrogé ? S’il l’a été qu’on le dise ; s’il ne l’a pas été, qu’on le dise. Il n’y est pas spécifié qu’il faille s’en tenir aux péchés mortels : « tous tes péchés confesseras. »

 

Un livre très sérieux que j’ai dans ma bibliothèque enjoint les fidèles « de l’un et l’autre sexe » de se confesser au moins une fois par année en vertu du décret porté par le concile de Latran, sous Innocent III (pape de 1198 à 1216). Comme il n’est pas possible, selon mon savant livre, de confesser « tous » ses péchés véniels, une personne qui n’a aucun péché mortel sur la conscience satisferait au décret du concile de Latran en se présentant au prêtre et en lui disant simplement qu’elle ne se pense coupable d’aucun péché mortel. Une telle confession ressemblerait aux « deux ou trois mots » dont parlait notre cardinal dans les journaux du 21 février. Comme « contact personnel », but de la réintroduction de la confession individuelle, admettez que c’est mince.

 

Mais, d’après Sylvius – qu’il repose en paix – et la majorité des théologiens et des canonistes de son temps, l’intention de l’Église serait d’obliger à la confession annuelle ceux-là seuls qui ont conscience d’avoir commis quelque péché mortel. L’interdiction de l’absolution collective ne changera donc pas grand-chose à la pratique religieuse, car les gens qui fréquentent l’église de nos jours ont dépassé l’âge du péché mortel : « Le désir décroît avec la capacité », dit Cicéron dans son traité De la vieillesse,, et il n’y avait, dans le Québec de leur jeunesse, qu’un seul péché, celui de la chair.

 

Saint Paul disait : « J’enseigne, je ne baptise pas » ; il aurait pu ajouter : « ni ne confesse ». La chaire est plus importante que le confessionnal : Fides ex auditu.

 

1.3. La loi nouvelle et les préceptes judiciaires

 

Quant aux préceptes judiciaires, ils sont laissés aux pouvoirs spirituels ou temporels selon le cas (Ia-IIae, q. 108, a. 2). L’Évangile ne s’immisce jamais dans le pouvoir judiciaire, contrairement à ce qui se passait sous l’Ancien Testament et qui se passe encore un peu dans le Coran. J’ai donné assez d’exemples des peines que Yahvé, prétendument, imposait aux Hébreux par l’intermédiaire de Moïse et de ses successeurs. Quant au Coran, il contient quelques préceptes judiciaires. En voici des exemples : « Vous couperez les mains des voleurs, homme ou femme, en punition de leur crime. C’est la peine que Dieu a établie contre eux » (Sourate V, 42). « Vous infligerez à l’homme et à la femme adultères cent coups de fouet à chacun. Que la compassion ne vous entrave pas dans l’accomplissement de ce précepte de Dieu, si vous croyez en Dieu et au jour dernier. Que le supplice ait lieu en présence d’un certain nombre de croyants » (Sourate XXIV, 2). « Ceux qui accuseront d’adultère une femme vertueuse, sans pouvoir produire quatre témoins, seront punis de quatre-vingts coups de fouet » (Sourate XXIV, 4). Allah s’intéresse aux héritages : « Dieu vous commande, dans le partage de vos biens entre vos enfants, de donner au fils mâle la portion de deux filles » (Sourate IV, 12).

 

Après avoir examiné chacune des trois catégories de préceptes, Thomas d’Aquin conclut que la loi nouvelle est moins onéreuse que l’ancienne en ce qui concerne les actes extérieurs, mais plus exigeante en ce qui concerne les dispositions intérieures, comme nous le verrons (Ia-IIae, q. 107, a. 4).

 

2. La loi nouvelle a suffisamment réglé les actes extérieurs

 

         La loi nouvelle n’impose aucun précepte judiciaire, aucun précepte cérémoniel et elle n’ajoute à peu près rien aux préceptes moraux de la loi naturelle. C’est bien peu. Alors, la question se pose : « La loi nouvelle a-t-elle suffisamment réglé les actes extérieurs ? » Oui, dit Thomas d’Aquin, et il va le prouver (Ia-IIae, q. 108, a. 2).

 

         Au grand plaisir de ceux qui pensent que Thomas d’Aquin a « baptisé » Aristote, il commence par affirmer qu’une chose paraît être ce qui prédomine en elle[13]. Dans les définitions descriptives, c’est la trompe qui prédomine chez l’éléphant ; la robe rayée chez le zèbre ; le cou démesuré chez la girafe, etc. Chez l’être humain, c’est la raison qui prédomine, même si ce n’est pas toujours évident, et on le définit « animal raisonnable ». Or, ce qui prédomine dans la loi du Nouveau Testament, c’est la grâce de l’Esprit saint, qui nous est donnée par la foi au Christ. Par conséquent, la loi nouvelle est principalement la grâce même de l’Esprit (Ia-IIae, q. 106, a. 1 et 2).

 

Thomas d’Aquin répond maintenant à la question qu’il a soulevée (Ia-IIae, q. 108, a. 2) : la loi nouvelle a-t-elle suffisamment réglé les actes extérieurs ? Il se réfère à Ia-IIae, q. 106, a. 1 et 2, où il a dit que la loi nouvelle, qui consiste principalement dans la grâce de l’Esprit saint, qui se manifeste par la foi, quand cette vertu opère par la charité, ne devrait prescrire que les actes par lesquels la grâce nous est communiquée et ceux qui concernent l’usage correct de la grâce, et interdire les actes qui produisent les effets contraires.

 

Or, nous ne pouvons pas obtenir la grâce par nos propres forces ; elle nous est communiquée par le Christ, c’est pourquoi le Seigneur a institué les sacrements par lesquels nous obtenons la grâce, la conservons et, au besoin, la recouvrons. Puis il énumère les sept sacrements : le baptême (qui nous fait enfants de Dieu), l’eucharistie (qui nourrit l’âme), l’ordre (sacrement des ministres de la nouvelle loi), la pénitence (devenue le sacrement du pardon), le mariage indissoluble, la confirmation (instituée quand le Christ a promis d’envoyer l’Esprit saint) et l’onction des malades. Tels sont les sacrements de la loi nouvelle, loi de l’Évangile.

 

Une fois la grâce obtenue et devenus enfants de Dieu, nous devons nous comporter en conséquence : noblesse oblige. Thomas d’Aquin va donc parler du bon usage de la grâce, rectus gratiae usus. Dans un sermon sur la Nativité, le pape saint Léon disait aux fidèles : « Reconnais, ô chrétien, ta dignité, et maintenant que tu as été rendu participant de la nature divine, garde-toi de reprendre la vie que tu menais auparavant » (IIIa, q. 1, a. 2). Qu’est-ce donc que le rectus gratiae usus exige du chrétien ?  Quand un être humain a été fait Christ, selon le mot d’Augustin, il doit s’efforcer de se comporter comme le Christ lui-même se comporterait. C’est ce que saint Paul nous invite à faire quand il déclare : « Pour moi, vivre, c’est le Christ. » Quel programme ! Se demander à chaque instant : Que ferait le Christ s’il était à ma place ? 

 

3.     La loi nouvelle a suffisamment réglé les actes intérieurs

 

Après avoir montré que la loi nouvelle a suffisamment réglé les actes extérieurs, Thomas d’Aquin montre que la loi nouvelle, loi de l’Évangile, a suffisamment réglé les actes intérieurs (Ia-IIae, q. 108, a. 3). Il fait d’abord sienne l’opinion d’Augustin commentant le discours sur la montagne : « [Augustin] fait remarquer qu’en disant " Celui qui écoute mes paroles ", le Seigneur a suffisamment montré que son discours contient tous les préceptes requis pour une vie chrétienne parfaite. »

 

Nous abordons ainsi la deuxième difficulté attachée à la pratique de la vertu ; elle réside dans les dispositions intérieures. L’acte vertueux doit être posé avec uniformité, ou constance, ou régularité – pas à l’occasion –,  avec promptitude et plaisir, comme il a été dit ci-dessus. On ne possède pas la vertu de justice quand on hésite à rendre le dû, qu’on ne le rend pas toujours ou qu’on le rend à contrecœur.  Voilà qui est difficile, très difficile pour les personnes qui titubent sur le chemin de la vertu. De ce point de vue, les préceptes de la loi nouvelle sont plus onéreux que ceux de l’ancienne, car les mouvements intérieurs de l’âme, interdits par la loi nouvelle, ne l’étaient pas expressément par l’ancienne, du moins pas dans tous les cas. Quand ils l’étaient, aucune peine ne sanctionnait cette interdiction. Or, c’est ce qui est le plus difficile pour l’être humain peu avancé en vertu ; car, comme le dit encore Aristote : « Il est facile de faire ce que le juste fait, mais le faire comme il le fait [avec régularité, promptitude et plaisir] ce n’est pas chose facile pour une personne qui ne possède pas la vertu de justice[14]. » Saint Augustin exprime la même idée quand il explique cette parole de saint Jean : « Ses préceptes ne sont pas pénibles » (Jean I, 5, 3). « Ils ne sont pas pénibles, dit-il, pour celui qui aime, mais ils le sont pour celui qui n’aime pas[15]. » À ce sujet, une phrase du même  saint Augustin est souvent citée : « Où il y a amour, il n’y a pas de travail, ou, s’il y a travail, on aime le travail. » En latin, la phrase est presque amusante : Ubi amatur, non laboratur, aut si laboratur, labor amatur. Voltaire se trompe quand il écrit : « Néron, le pape Alexandre VI, et d’autres monstres de cette espèce, ont répandu des bienfaits ; je réponds hardiment qu’ils furent vertueux ces jours-là[16]. » C’est trop de hardiesse : on n’est pas vertueux à si bon compte.

 

Le discours prononcé par le Seigneur sur la montagne, en nous traçant le plan complet de la vie chrétienne, établit parfaitement l’ordre qui doit régner dans nos actes intérieurs. En effet, après avoir fait connaître la fin de l’homme, qui consiste dans la béatitude, et établi le pouvoir des apôtres, qui doivent répandre dans le monde la doctrine de l’Évangile, le Seigneur ordonne l’homme dans ses mouvements intérieurs : d’abord par rapport à lui-même, quantum ad seipsum, puis par rapport au prochain, quantum ad proximum.

 

Par rapport à lui-même, le discours règle les deux mouvements intérieurs que l’on distingue dans toute action humaine : d’abord, la volonté d’agir, puis l’intention qui motive l’action. Quant à la volonté d’agir, le discours ordonne, conformément  aux divers préceptes moraux de la loi, qu’on s’abstienne non seulement des actes extérieurs mauvais en eux-mêmes, comme le vol, le meurtre, l’adultère, etc., mais encore des actes intérieurs, comme les pensées et les désirs, et des occasions de mal agir. Il règle ensuite l’intention en disant de ne pas chercher la gloire humaine ni les richesses temporelles, ce qui serait thésauriser pour la terre.

 

Par rapport au prochain, il règle le mouvement intérieur en interdisant de juger témérairement, injustement ou de manière présomptueuse. Le jugement conforme à la justice n’est évidemment pas proscrit, sinon on ne pourrait soustraire les choses saintes à ceux qui en sont indignes (Ia-IIae, q. 108, a. 3, sol. 6). Il enseigne enfin, comme moyen de vivre selon la doctrine évangélique, qu’il faut implorer le secours de Dieu tout en s’efforçant d’entrer par la porte étroite de la vertu parfaite ; qu’il faut user de vigilance pour ne pas être trompé par les séducteurs. L’observance des commandements du Seigneur est nécessaire à la pratique de la vertu : il ne suffit pas de confesser seulement sa foi, ou d’opérer des miracles, ou de seulement l’écouter.

 

4. La loi de l’Évangile, une loi de liberté

 

Convient-il de qualifier la loi de l’Évangile, de loi de liberté ? Sans conteste, selon Thomas d’Aquin. S’il en est ainsi, elle diffère de la loi ancienne qui contenait, comme nous l’avons vu, une multitude de préceptes moraux, judiciaires et cérémoniels ; à la liberté humaine, elle laissait bien peu à déterminer. Thomas d’Aquin va prouver que la loi nouvelle est une loi de liberté (Ia-IIae, q. 108, a. 1). La loi nouvelle consiste principalement dans la grâce de l’Esprit saint. Or, les actes extérieurs peuvent appartenir à la grâce de deux manières : d’abord comme moyens qui y conduisent : ce sont les œuvres des sacrements, opera sacramentorum ; les actes extérieurs peuvent encore appartenir à la grâce comme effets produits par la grâce elle-même.

 

Considérés sous ce dernier rapport, les actes extérieurs se rangent dans deux catégories. Certains actes présentent une nécessaire conformité ou  opposition avec la grâce intérieure. Ces actes-là – confesser sa foi, par exemple – sont commandés ou interdits par la loi nouvelle. La liberté de la loi nouvelle est ailleurs. Mais d’autres actes extérieurs ne présentent pas une nécessaire conformité ou opposition avec la grâce intérieure. Ceux-là la loi nouvelle, dans son institution primitive, ne les a ni commandés ni interdits. Le Législateur (c’est-à-dire le Christ) a laissé à la liberté de chacun de déterminer ce qui lui est avantageux de faire ou de ne pas faire.

 

C’est par rapport à cette catégorie d’actes extérieurs que la loi de l’Évangile est qualifiée de « loi de liberté », par opposition à la loi ancienne qui réglait beaucoup de choses, multa determinabat, et en laissait peu à déterminer par la liberté humaine, pauca relinquebat hominum libertati determinanda  (Ia-IIae, q. 108, a. 1).

 

La réponse à la deuxième objection apporte davantage de lumière. Voici d’abord l’objection. La loi nouvelle est la loi de l’Esprit (Rom 8, 2). Mais où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté (2 Cor 3, 17). Mais il n’y a pas de liberté quand l’homme est obligé de poser certains actes extérieurs ou de s’en abstenir. Donc la loi nouvelle ne doit pas prescrire ou empêcher des actes extérieurs (Ia-IIae, q. 108, a. 1, obj. 2).

 

Thomas d’Aquin y répond en invoquant d’abord Aristote. Être libre, c’est être cause de soi, liber est, qui sui causa est (Métaphysique, I, c. 2).  Donc celui-là agit librement qui décide de son action, qui ex ipso agit, c’est-à-dire qui n’exécute pas les ordres d’un autre pour le bien de cet autre, comme l’esclave exécute les ordres du maître pour le bien du maître, mais qui poursuit son propre bien, même dans l’exécution des ordres reçus. Or, quand un être humain agit en vertu d’une disposition stable, ex habitu, qui convient à sa nature, on peut dire qu’il agit librement, ex seipso, parce que l’habitus incline selon le mode de la nature. Mais, si l’habitus qui le fait agir répugne à la nature, comme dans le cas d’un vice, l’être humain n’agit pas selon ce qu’il est lui-même, mais d’après quelque disposition survenue en lui.

 

Par conséquent, la grâce de l’Esprit saint étant un habitus intérieur infusé en nous qui nous incline à agir correctement, elle nous fait poser librement les actes qui conviennent à la grâce et éviter ceux qui lui répugnent. Ainsi donc la loi nouvelle peut être qualifiée doublement de loi de liberté. D’abord, elle ne nous oblige à faire ou à éviter certaines choses qu’autant qu’elles sont par elles-mêmes nécessaires ou contraires au salut ; celles-là seules sont prescrites ou interdites par la loi. En second lieu, elle nous fait accomplir librement ces préceptes, en ce sens qu’en les accomplissant nous suivons l’impulsion intérieure de la grâce. C’est pour cette double raison que saint Jacques qualifie la loi nouvelle de « loi de parfaite liberté », lex perfectae libertatis (I, 25).

 

Conclusion

 

Hélas ! les humains n’aiment pas tous une religion qui laisse trop de liberté, une religion qui ne se comptabilise pas. Ils aiment les choses précises : communiez neuf premiers vendredis du mois de suite, et vous serez sauvés ; récitez trois Ave Maria chaque soir, et vous serez sauvés, etc. Le Coran, avec ses cinq devoirs principaux, plaît aux personnes qui font souvent le bilan de leurs chances de salut : 1. Croire qu’il n’y a de Dieu qu’Allah, et que Mahomet est son prophète. 2. Prier cinq fois par jour. 3. Faire l’aumône selon les formes prescrites. 4. Observer le jeûne du Ramadan. 5. Faire au moins une fois dans la vie le pèlerinage à La Mecque [si possible]. L’Évangile parle de la prière, du jeûne et de l’aumône, mais sans apporter de précisions sur la manière de s’y adonner.

 

Au scribe qui l’interroge sur le plus grand des commandements, Jésus répond : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit et de toute ta force. Voici le second : Tu aimeras ton prochain comme toi-même. Il n’y a pas de commandement plus grand que ceux-là » (Marc 12, 28-32). La scène du jugement dernier, qu’il faut interpréter comme une parabole, disent les exégètes, précise en quoi consiste cet amour.  Écoutons Matthieu : « Quand le Fils de l’Homme viendra dans sa gloire, escorté de tous les anges, alors il prendra place sur son trône de gloire. Devant lui seront rassemblées toutes les nations, et il séparera les gens les uns des autres, tout comme le berger sépare les brebis des boucs. Il placera les brebis à sa droite, et les boucs à sa gauche. Alors le Roi dira  à ceux de droite : " Venez, les bénis de mon Père, recevez en héritage le royaume qui vous a été préparé depuis la fondation du monde. Car j’ai eu faim et vous m’avez donné à manger,  j’ai eu soif et vous m’avez donné à boire, j’étais un étranger et vous m’avez accueilli, nu et vous m’avez vêtu, malade et vous m’avez visité, prisonnier  et vous êtes venus me voir. " Alors les justes lui répondront : " Seigneur, quand nous est-il arrivé de te voir affamé et de te nourrir, assoiffé et de te désaltérer,  étranger et de t’accueillir, nu et de te vêtir, malade ou prisonnier et de venir te voir ? " Et le Roi leur fera cette réponse : " En vérité je vous le dis, dans la mesure où vous l’avez fait à l’un de ces plus petits de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. " » (Matthieu 25, 31-41).  Quand saint Jean dit qu’il ne faut pas aimer seulement en paroles mais en actes (I 3, 18), c’est à cette description du jugement dernier qu’il faut penser. Quand le Roi se tournera vers sa gauche, le regard courroucé, il est fort possible qu’il n’y ait pas un seul bouc et qu’il n’ait pas à prononcer le terrible verdict : « Allez, maudits, au feu éternel. »

 

Un dimanche de 2006, à Notre-Dame-de-Foy (Québec), le célébrant parlait de la fréquentation des églises ; la population des cinq paroisses, maintenant fusionnées, s’élève à 25 000 habitants ; le nombre de pratiquants, environ 1500, soit 6 %.  Si l’habitude existait de poser des questions pendant l’homélie, j’aurais rappelé la scène du jugement dernier. Si, au lieu de compter les personnes âgées présentes dans les cinq lieux de culte, on avait demandé aux 25 000 quelles sont celles qui, pendant la semaine, ont donné à manger, donné à boire, vêtu, consolé, visité, etc., 20 000, peut-être, auraient répondu : « J’ai posé au moins un de ces actes ou un autre contenu dans l’etc. » Ne sont-elles pas pratiquantes du christianisme authentique, elles aussi ?

 



[1] Somme théologique, Ia-IIae, q. 107, a. 4. Je ne répéterai pas Somme théologique chaque fois.

[2] Aristote, Éthique à Nicomaque, Classiques Garnier, 1961, III, chap. IX.

[3] Augustin Les Confessions, V, chap. 14.

[4] Paul Valéry, Œuvres, Paris Gallimard, La Pléiade, II, p. 511.

[5] Thomas d’Aquin, Somme contre les Gentils, III, chap. 3.

[6] Thomas d’Aquin, Quaestiones disputatae, De Virtutibus in communi, q. 1, a. 1.

[7] Sénèque, De la Vie heureuse, XIV.

[8] R.P. Sertillanges, o.p., La Philosophie morale de saint Thomas d’Aquin, Paris, Aubier, 1946, p. 390.

[9] Sénèque, De la Vie heureuse, VIII, 1.2.

[10] Héloïse et Abélard, Lettres, Paris, 10-18 ; 188-189, 1964, p. 224.

[11] Jacques Leclercq, revue Maintenant, Septembre 1964.

[12] Somme Théologique de saint Thomas d’Aquin, traduite en français et annotée par F. Lachat, tome sixième, 1857, p. 709.

[13] Aristote, Éthique à Nicomaque, Classiques Garnier, 1961, IX,  chap. IV, 4.

[14] Aristote, Éthique à Nicomaque, V, chap. IX, 14.

[15] Augustin, De la nature de la grâce, LXIX.

[16] Voltaire, Dictionnaire philosophique, GF ; 28, 1964, p. 374.